La Sélection du Lab #5 – Aidez les gestionnaires d’aires marines protégées à détecter les activités de pêche illégale depuis votre smartphone !

Par mars 6, 2017Sélection

Chaque semaine, Le Lab sélectionne pour vous une actualité ou une initiative jugée particulièrement intéressante et pertinente et la présente en quelques lignes. Cette semaine, le Lab vous propose de découvrir un jeu, Tap-a-boat, mis au point par des développeurs lors du Fishackathon, événement ayant eu lieu du 22 au 24 avril 2016. 

Comment réussir à protéger les aires marines protégées des activités de pêche illégale sans pour autant déployer une surveillance humaine très onéreuse à l’échelle des surfaces protégées ? C’est à ce défi, aujourd’hui posé aux gardes et gestionnaires des aires marines du monde entier, que Tap-a-boat tente de répondre.

Cette application mobile propose de mobiliser un public très large et à priori non sensibilisé à la préservation des ressources halieutiques, celui des joueurs accros aux mini-jeux ou tout simplement propriétaires de smartphones. La règle du jeu est très simple (voir la vidéo de présentation) : taper sur les tâches de couleur qui apparaissent sur l’écran le plus rapidement possible et engranger des points. Sans même s’en rendre compte, le joueur participe alors à la surveillance d’aires marines protégées parfois situées de l’autre côté du globe. En effet, le fond de carte qui défile sur son écran provient en réalité de données satellitaires sur des surfaces maritimes protégées. Les embarcations illégales présentes dans la zone sont visibles sur ces images et repérées par le joueur, qui gagne des points bonus en cliquant dessus. Les coordonnées satellites des bateaux signalés sont alors envoyées aux gestionnaires de la zone concernée. Un tableau de bord commun à tous les gestionnaires inscrits à l’application leur permet de suivre le repérage des navires de pêche mais également d’échanger et de communiquer entre eux.

Encore au stade de démonstration, ce jeu nécessite des améliorations mais il pourrait devenir un outil très utile pour la gestion des aires marines protégées et pourquoi pas, à plus long terme, celle des ZJAN (zones marines situées au-delà de la juridiction nationale) dont la protection fait l’objet d’un cycle de négociations à l’ONU [1]. La surveillance des espaces maritimes demande des moyens financiers et humains conséquents que les aires marines ne peuvent pas mobiliser et l’analyse de données satellitaires en temps réel par les seuls gestionnaires de ces aires est impossible. Mobiliser le grand public par une approche ludique et la source infinie que sont les données satellitaires apparaît donc comme une idée novatrice.

Un autre aspect intéressant de ce jeu est le contexte dans lequel il a été créé : le Fishackathon. Cet  événement a été organisé en avril dernier en simultané dans plusieurs villes à l’échelle mondiale de la planète par le gouvernement américain en collaboration avec des acteurs privés. Construit sur le modèle des hackathons, rassemblements d’acteurs de milieux très différents (et souvent de développeurs) devant répondre en un temps limité à un défi, le Fishackathon a mobilisé des spécialistes du codage et des scientifiques avec comme objectif principal de produire des applications permettant d’accompagner les pêcheurs vers des pratiques plus durables. Ce type de rencontres entre des acteurs de mondes différents produit des résultats surprenants et sortant du cadre des solutions habituelles. D’autres enjeux environnementaux pourraient ainsi être traités et analysés grâce à ces méthodes de travail [2].

L’aspect ludique de ce type d’événement et de certaines des solutions proposées est enfin à souligner : l’approche par le jeu peut permettre de sensibiliser le grand public à des causes environnementales de manière beaucoup plus efficace que des supports d’information ou des événements formels. La simulation sur le changement climatique « Heat Wave in My city », organisée en décembre dernier par CliMates et Vertigo Lab, en est une excellente illustration.

Les gagnants du Fishackathon seront nommés le 8 juin, à l’occasion de la Journée de l’Océan, avec à la clé une aide financière et technique pour développer leur dispositif. Souhaitons bonne chance à Tap-a-boat !

[1] Voir à ce sujet la publication de Julien Rochette et Glen Wright, chercheurs à l’IDDRI.

http://www.iddri.org/Publications/Collections/Syntheses/IB0416_GW%20et%20al._high%20seas.pdf et http://www.iddri.org/Publications/Collections/Syntheses/IB0416_GW%20et%20al._high%20seas.pdf

[2] Le ministère de l’environnement organise par exemple du 20 au 22 mai prochain un hackathon sur les services innovants de consommation d’énergie.